L'opposition ? Quelle opposition ?
 Par Olivier Picard |
Sans le vouloir, le CSA a mis au jour l'obsolescence du paysage politique français traditionnel.
Les trahisons des uns, les fausses rivalités, les tentatives de manipulation par l'intermédiaire des médias, les faux-semblants, les reniements et l'hypocrisie ont fini par rendre totalement opaque la lecture de la carte des appartenances et des alliances. Comment reconnaître aujourd'hui la frontière entre la droite et la gauche quand les philosophies de l'une et de l'autre ne se dégagent plus clairement d'un débat corrompu par les conformismes intellectuels de tout bord ?
Classer François Bayrou et dix députés centristes dans l'opposition parce qu'ils ont voté la motion de censure contre le gouvernement pourrait sembler logique quand on mesure à quel point ces personnalités UDF ne se reconnaissent plus dans le double modèle qui leur est présenté à la fois par le gouvernement et par le président de l'UMP. Mais l'inhabituel raccourci pris par les sages de l'audiovisuel tente de redessiner une rationalité introuvable et, ce faisant, il catalogue tout aussi faussement le président de l'UDF. Car aujourd'hui François Bayrou n'appartient pas davantage à la gauche qu'il ne s'identifie à son ancienne famille traditionnelle de droite.
L'oukase du CSA apparaît d'autant plus violent que le fougueux Béarnais prétend précisément s'affranchir de l'« apartheid » qui aliénerait depuis trop longtemps notre démocratie en la scindant en deux entités définitivement irréconciliables. Pour le CSA, c'est en clair : le centre n'a pas d'existence propre aux yeux des médias. Tout juste serait-il condamné à n'être que le supplétif versatile des deux coalitions électorales qui dominent la Ve République et ses alternances depuis 1958.
Pour l'UMP, ce reclassement est pain bénit. Le traître à son camp est officiellement désigné et comptabilisé comme tel par une autorité indépendante. Le voilà exclu de fait, du moins aux yeux de l'opinion, d'un bloc politique dont l'électorat a toujours - en dépit de ses foucades - accordé ses voix à ses élus. Entre l'UDF et l'UMP, c'était une séparation de corps. On la présente aujourd'hui comme un divorce pour faute. La prise d'indépendance est requalifiée comme une infidélité avérée...
Dans ce triste vaudeville, la gauche se défend d'avoir débauché une conquête qu'elle renie d'avance. On lui fera tout de même payer le soupçon en temps d'antenne. Zappons.
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